Troisième année de vie publique

Durant la fête des tabernacles

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La surprise est grande parmi la foule présente au Temple, lorsque Jésus y apparaît enfin, plusieurs jours après le début de la fête. Très nombreux sont ceux, amicaux ou hostiles, qui se pressent autour du Maître pour écouter ses paroles. Les quatre évangélistes, à des degrés divers ont évoqué quelques passages de cet important discours744, que Maria Valtorta nous rapporte sur plus de six pages. « Jésus se met à prêcher pour la centième fois la venue du Royaume de Dieu et la préparation de ce Royaume. Et je pourrais dire qu'il répète avec plus de puissance les mêmes idées exposées, presque à la même place, vingt ans auparavant »486.3 écrit la mystique italienne, évoquant la première intervention de Jésus au Temple, lors de son examen de majorité, à la Pâque de l'an 9.

Bien entendu les habituels interrupteurs interviennent, posant toutes sortes de questions qui se veulent déstabilisantes, ou qui apparaissent faussement condescendantes. Alors Jésus, qui était très calme, les accuse d'une voix de tonnerre : « Dieu pardonne tant de choses et sa Lumière resplendit avec amour pour éclairer les ignorances et dissiper les doutes. Mais Il ne pardonne pas à l'orgueil qui se moque de Lui, en se disant plus grand que Lui ». (...) « Vous prétendez dire à Dieu : "Il n'est pas possible que le Christ soit un galiléen, un homme du peuple. Il n'est pas possible que ce soit lui". Qu'est-ce qui est impossible à Dieu ? »486.4. Un calme relatif étant revenu, Jésus peut répondre à une nouvelle question sur le temps où viendra son règne. Ses réponses inspirées surprennent la plupart des auditeurs, et l'un d'eux interroge : « Dis-nous donc. Où tu as trouvé cette doctrine que tu enseignes ? »486.6. Jésus répond sublimement à cette question fondamentale dont saint Jean a résumé l'essentiel (Jn 7,16-18). Puis, en quittant l'esplanade du Temple, Il réconforte ses disciples selon les paroles rapportées par les synoptiques (Mt 24,26-27 ; Lc 17,22-25 ; Mc 13,21) tout en allant vers une des nombreuses maisons mises à sa disposition par Lazare.

Lorsque qu'Il revient au Temple le lendemain, la foule est encore plus nombreuse. Un gentil Lui pose une question : « Maître, parle nous un peu, aujourd'hui. On a dit que tu affirmes que tous les hommes sont venus d'un seul Dieu, le tien. (...) Des poètes stoïques de chez nous745ont eu aussi cette même idée. Ils ont dit : Nous sommes de la race de Dieu. Tes compatriotes nous disent plus impurs que des bêtes. Comment concilies-tu les deux tendances ? »487.2. Mais avant même qu'Il ne puisse répondre, un pharisien intervient : « Lui est un homme ordinaire. Le Christ ne sera pas comme cela. Tout sera exceptionnel en Lui : forme, nature, origine… »487.2. La réponse de Jésus, telle qu'évoquée par Jean (Jn 7,25-30) provoque une grand tumulte. Les plus acharnés sont prêts à molester Jésus, et il faut que Gamaliel use de toute son autorité pour les calmer : « Laissez-le tranquille. Je veux entendre ce qu'il dit »487.4. Cette intervention permet d'ailleurs de comprendre comment Jésus a pu prononcer son discours sans être poursuivi pour blasphème. Jamais encore en effet Il ne s'était présenté en public aussi clairement comme étant le « Fils de Dieu » et le Messie attendu. Gamaliel saisit immédiatement la portée de ce discours, et pour la première fois publiquement, il prend des notes. Toute l'argumentation de Jésus, basée essentiellement sur les Psaumes (Ps 2,7 ; 97,7 ; 110,1-4, etc.) se retrouve manifestement dans l'Epître aux Hébreux (He 1,6-14). L'auteur de l'épitre aurait-il utilisé les notes de Gamaliel746 ?

Jésus rappelle aussi la parole divine prononcée « à la fin de la troisième année depuis celle-ci747 »487.6 au gué de Béthabara748, « et plusieurs d'entre vous qui me combattez, étiez présent749 »487.6. Seul un nouveau docteur angélique pourrait nous aider à saisir la profondeur de cet extraordinaire discours du Christ. Et qui pourrait encore affirmer, après l'avoir lu, qu'il puisse être l'œuvre d'une romancière, aussi géniale soit-elle ? Gamaliel, en tout cas, ne s'y est pas trompé, lui qui exige de rester seul un moment avec Jésus, pour obtenir quelques éclaircissements. « J'ai voulu t'écouter parler… Eux n'ont pas compris. Moi, j'espère pouvoir comprendre. J'ai écrit tes paroles pendant que tu les disais. Pour les méditer, non pas pour te nuire ».

Pour la troisième fois, le jour suivant, Jésus revient au Temple. Comme Il y arrive un peu plus tard, certains s'apprêtaient à le chercher à travers la ville. Jésus leur déclare : « Mes instructions resteront en vous et vous les comprendrez encore davantage quand je m'en serai allé… ». Mais ses interlocuteurs se méprennent sur ces paroles. « Oh ! Maître ! Mais tu veux vraiment t'en aller ? Dis où tu vas et nous te suivrons. Nous avons tant besoin de Toi ! »488.2. Jean, comme il l'a fait pour les deux premières journées de la fête, résume aussi la réponse que fit le Christ ce jour là(Jn 7,33-36). « Et où je suis, vous, vous ne pourrez pas venir »488.2. Et cette affirmation suscite bien des interrogations parmi les témoins. Mais Jésus est déjà sorti du Temple, et se dirige vers Nobé, par des sentiers peu fréquentés que Lui indiquent les bergers Benjamin et Isaac. Chaque disciple propose un lieu possible de refuge, et finalement ils s'avèrent nombreux les endroits autour de Jérusalem, où Jésus pourra se retirer discrètement, en cas de besoin.

A Nobé750 Jésus rencontre Jean, le patriarche du village, qui fut témoin, trente deux ans plus tôt, des paroles de Siméon, restées gravées dans sa mémoire, et qui proclame : « Laisse, ô Seigneur, ton serviteur s'en aller en paix, puisque mes yeux ont connu ton Christ !751 »489.2. Devant les habitants rassemblés, Jésus donne une parabole tandis que Manaën et Timon, que Mathias est allé chercher, se présentent devant Jésus, encore inquiets par suite des reproches encourus pour leur participation au banquet chez Chouza. Jésus les accueille à bras ouverts. « Tu nous aimes ? Maître ? Comme avant ? » demandent-ils. « Plus qu'avant, car maintenant vous êtes guéris de toute humanité dans votre amour pour Moi »489.5. leur répond Jésus. Une mini tornade abrège ces retrouvailles, et tous doivent se mettre rapidement à l'abri. Plusieurs s'inquiètent pour les pèlerins qui, à Jérusalem, n'ont que leurs huttes de branchages pour s'abriter. « Seigneur ! Jésus ! Pitié ! » supplient d'autres. Jésus sort dans la tempête, lève les bras et commande : « Suffit ! Je le veux ! »489.7. Et le vent cesse tout d'un coup752. Un peu plus tard dans la journée, Jésus accompagné de ses cousins, se rend au camp des galiléens pour y rencontrer ses compatriotes.

Notes de bas de page

744
Voir en particulier Jn 7,15-24 ; Lc 13,15 ; 14,5 ; 17,20-21.

745
Cette pensée, que l'on retrouve dans Actes 17,28, était effectivement déjà exprimé au 3e siècle av J.-C. par Aratos (poète et astronome) dans Phaenomena8. et par Cléanthe (philosophe stoïcien) dans Hymne à Zeus.

746
Est-ce Paul ou Apollos, celui qui utilisa ces notes ? Osty écrit dans l'introduction à l'épitre : « Nous attribuerions volontiers cette épître à Apollos, qui l'aurait écrite vers l'an 65 ». Et il signale que déjà Eusèbe (Hist. Eccl. livre VI, XXV, 13-14) se posait la question. Dans cette hypothèse, Apollos était-il un disciple de Gamaliel, aux côtés de Paul ?

747
De multiples témoignages dans l'œuvre permettent de dater le baptême de Jésus au changement de lune entre Tévet et Shevat, fin 26, début 27, comme nous l'avons déjà vu.

748
Matthieu, Luc et Marc (Mt 3,17 ; Lc 3,22 ; Mc 1,11) évoquent la Voix de Dieu, au baptême de Jésus : « C'est toi, mon Fils, le Bien-aimé... » (voir aussi MV 215.4).

749
Selon Actes 18,24-25, Apollos ayant connu « le baptême de Jean » et étant versé dans les Écritures, aurait pu être un de ces témoins qu'évoque Jésus !

750
L'emplacement exact de Nobé est encore inconnu. Maria Valtorta semble la situer sur les pentes du mont Scopus.

751
A noter que c'est la première fois dans l'œuvre que sont données les paroles du Cantique de Siméon selon Lc 2,29-30.

752
Après l'eau (la tempête sur le lac et le Jourdain en crue) et le feu (la vallée embrasée), voici l'air, troisième élément dominé par le Verbe. En attendant la terre (tremblement de terre de la Passion), signe promis à Gamaliel depuis 20 ans !

📚 Source : L'énigme Valtorta par Jean-François LavèreTome 1Tome 2