La pécheresse et les deux "Marie"
Voici bien une question qui fit l'objet de débats intenses parmi les exégètes : faut-il voir en la pécheresse repentie, en Marie de Béthanie, et en Marie de Magdala une seule personne, ou deux ou trois personnes distinctes ? Les évangiles peuvent sembler distinguer trois personnes. Les quatre évangélistes diffèrent sur certains détails, mais comme ces trois femmes présentent des points communs, (notamment au niveau de leur tempérament de feu), les Pères de l'Eglise ont discuté pour savoir s'il s'agissait d'une seule et unique sainte379. C'est finalement au début du 7ème siècle en Occident, et vers le 9ème siècle en Orient qu'apparaît un accord sur l'unicité de la femme au parfum en lui donnant le nom de Madeleine, ou Marie-Madeleine. Dans son œuvre, Maria Valtorta ne laisse place à aucune incertitude : la pécheresse repentie, c'est Marie de Magdala, la sœur de Lazare et de Marthe. Elle est dite de Magdala tout simplement parce que c'est là, à proximité de Tibériade, qu'elle avait trouvé refuge dans une propriété appartenant à sa famille, pour donner libre cours à sa vie licencieuse. Il y a donc une seule et unique personne : « Marie de Magdala, la grande pécheresse d'Israël, celle qui n'avait pas d'excuse pour son péché, est revenue au Seigneur »250.5.
Sa conversion est si totale que son frère Lazare s'interroge : « Moi… je ne puis comprendre où elle trouve la sagesse, les paroles, les actes qu'elle trouve et qui édifient toute la maison. Moi, je la regarde comme on regarde un mystère. Mais comment tant de feu, tant de gemmes pouvaient-ils être cachés sous tant d'ordure et y vivre à leur aise ? Ni moi, ni Marthe ne nous élevons ou elle s'élève. Comment le peut-elle si elle a eu ses ailes brisées par le vice ? Moi, je ne comprends pas »279.2. « Et il n'est pas nécessaire que tu comprennes. Il suffit que je comprenne, Moi. Mais je te le dis: Marie a retourné vers le Bien les puissantes énergies de son être. Elle a dirigé son tempérament vers la Perfection. Et comme elle a un tempérament d'une puissance absolue, elle s'élance sans réserve par ce chemin. Elle fait servir son expérience du mal pour être puissante dans le bien comme elle l'a été dans le mal, et mettant en œuvre la même méthode de se donner toute entière qu'elle avait dans le péché, elle se donne toute entière à Dieu. Elle a compris la loi "d'aimer Dieu avec tout soi-même, avec son corps, avec son âme, avec toutes ses forces". Si Israël était composé de Marie, si le monde était fait de Marie, nous aurions sur la terre le Royaume de Dieu, tel qu'il sera dans les hauteurs du Ciel ». « Oh ! Maître, Maître ! Et c'est Marie de Magdala, celle qui mérite ces paroles ! »279.3.
Ces paroles, comme tant d'autres tout au long de l'œuvre, permettent aussi de démystifier certaines interprétations gnostiques, modernistes ou parfois même blasphématoires de l'évangile de Marie-Madeleine et d'autres textes apocryphes. Elles permettent aussi de comprendre pourquoi les apôtres, puis les évangélistes, par admiration et respect devant la totale conversion de Marie-Madeleine, n'évoquèrent son passé de pécheresse que sous couvert d'anonymat, pour ne nommer clairement que Marie la disciple. Et c'est parce que « Marie sait aimer plus que tous »550.3, aimer « avec une séraphique ardeur »377.7 qu'elle eut le privilège d'être la première à voir le Seigneur ressuscité.
Un Joseph Barsabbas et un Joseph Barnabas ?
Lorsqu'il fut décidé de trouver un remplaçant à Judas, Luc (Actes 1, 21-23) nous indique : « On en présenta deux : Joseph appelé Barsabbas380, surnommé Justus, et Matthias ». Puis un peu plus loin (Actes 4, 36), il raconte le don généreux d'un disciple : « Joseph appelé en outre Barnabas381 par les Apôtres - ce qui s'interprète fils de consolation - Chypriote, lévite de naissance ». Le même prénom, deux surnoms presque semblables, et probablement quelques erreurs malheureuses de copistes, il n'en fallait pas plus pour que soit posée la question. S'agit-il de deux personnages différents, ou d'un seul et même disciple ? Les avis sont partagés parmi les biblistes, et personne n'a réussi à convaincre l'ensemble de ses confrères. Pour Maria Valtorta, la question ne se pose même pas. Le compagnon de Matthias, « un de ces hommes qui ont accompagné les apôtres pendant tout le temps que le Seigneur Jésus est allé et venu parmi eux » (selon Actes 1, 21 ), c'est le berger Joseph382, que Jésus a spécialement choisi comme disciple dès l'été 27, en disant : « Je retiens ce fils (et il montre Joseph) car je lui délègue la charge de porter à ses compagnons mes paroles, pour qu'il se forme là un noyau solide qui ne m'annonce pas seulement en faisant connaître mon existence, mais les caractéristiques les plus essentielles de ma doctrine »91.1. Il est plus précisément nommé « Joseph, fils de Joseph de Saba »639.5 lors de l'élection de Matthias. Dans L'évangile tel qu'il m'a été révélé, il ne saurait être confondu avec Joseph Barnabé, le lévite, élève fidèle de Gamaliel, et futur compagnon de saint Paul, reçu officiellement disciple à la dernière heure, juste avant la Passion : « toi, Barnabé qui as quitté tes compagnons aujourd'hui pour me suivre »592.20.
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Bien entendu, le texte de Maria Valtorta ne se borne pas à apporter sa solution à ces quelques doublons évangéliques. C'est presque à chaque paragraphe qu'on peut trouver de tels éclaircissements, sans qu'il y paraisse toujours, tant ils s'intègrent naturellement dans le discours. Et une fois de plus je dois me résoudre à en choisir arbitrairement quelques uns parmi la multitude. Voici donc maintenant quelques exemples qui illustrent comment L'Evangile tel qu'il m'a été révélé peut aider à une meilleure compréhension de quelques passages évangéliques ou bibliques.