L'Annonciation
Un an exactement a passé depuis l'installation de Marie à Nazareth, et non pas deux mois, comme ont pu l'imaginer certains exégètes131. Marie, « une très jeune adolescente - quinze ans au plus à la voir »16.1 observe Maria Valtorta. Nous apprendrons des milliers de pages plus loin dans l'œuvre : « C'était un serein après-midi d'Adar132348.11, ce qui permet de situer l'Annonciation entre le 7/2/-5, et le 6/3/-5 (par conversion du calendrier hébraïque pour le mois d'Adar). Or chaque année durant la vie publique de Jésus, Marie, pour l'anniversaire de l'Annonciation, décore sa maison avec des branches fleuries d'arbres fruitiers133. Plusieurs détails chronologiques dans l'œuvre permettent de dater l'événement entre le 15 et le 21 Adar, c'est-à-dire, pour l'an -5, entre le 21 et le 25 février. Dans une dictée à Maria Valtorta, le 31 Janvier 1947, Jésus donne cette autre précision décisive : « Marie partit chez sa cousine pendant l'octave pascale (...) soit environ un mois après l'Annonciation ». La Pâque ayant eut lieu cette année là le 21 mars, ceci confirme parfaitement cette période du 21 au 25 février pour l'Annonciation134. Cette date diffère légèrement de la date traditionnelle de l'Annonciation fixée par l'Église au 25 mars135. Curieusement, deux documents très anciens sont considérés comme indiquant la naissance de Jésus au printemps. Le premier, écrit en 202 ou 204, mentionne un mercredi 2 avril136. Le second, daté de 243, suggère également un mercredi, le V des calendes d'avril (soit le 28 mars) , et précise : « au jour où fut créé le soleil, en ce jour est né le Christ137 ». Ces deux textes pourraient-ils se référer non pas à la Nativité, mais bien plutôt au jour de l'Incarnation du Sauveur ? Ils ne pouvaient en effet être ignorés du pape Libère lorsqu'il fixa justement, à peine un siècle plus tard, la Nativité au 25 décembre, soit neuf mois après l'Annonciation !
Suivant en cela le texte de Luc (Lc 1,28), la plupart des commentateurs situent l'Annonciation dans la maison paternelle de Marie, à Nazareth, tout comme l'indique aussi le texte de Maria Valtorta. Marie travaille dans sa très modeste chambre. « Elle file du lin très blanc et doux comme de la soie. Ses petites mains, un peu moins claires que le lin, font tourner agilement le fuseau »16.1. On reverra souvent Marie au tissage et à ses travaux de couture, qu'elle a appris au Temple. Saint Epiphane nous apprend qu'elle excellait dans la broderie et dans l'art de travailler la laine et le lin : « son adresse sans égale à filer le lin de Péluse est encore traditionnelle dans l'Orient, et les chrétiens occidentaux, pour en perpétuer la mémoire, ont donné le nom de fil de la Vierge à ces réseaux éclatants de blancheur et d'une contexture presque vaporeuse qui planent sur le creux des vallons pendant les humides matinées d'automne138 ».
Maria Valtorta poursuit le récit de cette céleste vision : « Marie se met à chanter à voix basse et puis elle élève un peu la voix. (...) Le chant se change en une prière : Seigneur, Dieu Très-Haut, ne tarde pas d'envoyer ton Serviteur pour apporter la paix sur la terre... »16.2. Voici bien un remarquable écho à un témoignage de saint Alphonse de Liguori : « Aussi, pendant que l'humble Vierge, retirée dans sa pauvre cellule, soupirait avec ardeur et original fut altéré pour indiquer le 25 décembre, et elle en déduisit que Jésus était « né » au printemps. Pourtant Hippolyte, au 3e siècle, aurait-il pu ignorer que le recensement ne pouvait pas, en Palestine, avoir lieu au moment de la Pâque ?
suppliait Dieu d'envoyer le Messie, comme sainte Elisabeth139, de l'ordre de saint Benoît, l'apprit par révélation140... »
Dans un souffle d'air apparaît l'Archange Gabriel. A sa douce salutation, « Marie tressaille et baisse les yeux. Et elle tressaille davantage quand elle voit cette créature de lumière agenouillée à un mètre environ de distance d'elle. (... ) Elle devient pâle, puis rouge. Son visage exprime étonnement, effarement »16.4. C'est l'attitude que décrivait saint Bernard : « La Vierge est troublée mais elle n'est pas confondue. Elle garde le silence et se demande ce que veut dire cette salutation mystérieuse. Or se troubler est le propre de la pudeur, ne pas être confondue est le propre de la force, et se taire est le propre de la prudence141 ». La suite du dialogue transmis par Maria Valtorta est bien entendu conforme à ce que nous en connaissons par le témoignage de l'évangéliste Luc. Toutefois il comporte quelques éléments originaux qui le rendent à la fois vivant et hautement crédible, et mériterait d'être étudié par les exégètes142.
Le soir venu, Marie vaque à ses occupations domestiques. Son fiancé Joseph, comme chaque soir, vient lui rendre visite à la fin de sa longue journée de travail, pour s'assurer qu'elle ne manque de rien. Il lui rapporte de Cana « une grappe de raisin, un peu avancé mais bien conservé… il est bon, doux comme du miel143 » 18.3. Marie l'informe de son intention : « Il est venu un messager, quelqu'un qui ne saurait mentir. Je voudrais aller chez Elisabeth pour lui rendre service et lui dire que je me réjouis avec elle. Si tu le permets… »18.5. Joseph lui propose alors : « Je dois aller avant la Pâque à Jérusalem... Si tu attends quelques jours, je t'accompagnerai jusque là... »18.5. Ceci est parfaitement compatible avec la chronologie indiquée ici, mais serait inconciliable avec l'Annonciation le 25 mars, puisqu'en -5 la Pâque fut célébrée à l'occasion de la pleine lune du jeudi 21 mars. Les mystiques C. Emmerich et M. d'Agreda ont vu elles aussi Joseph accompagner Marie dans son voyage144.