Jésus devient fils de la Loi (bar mitsva)
Le temps passe, et Jésus est maintenant « un bel enfant de douze ans »39.4. C'est le printemps de l'an 9, et la Pâque est proche. Jésus ayant atteint l'âge de sa majorité légale226 depuis le 7 janvier, vient en compagnie de ses parents accomplir au Temple le rite requis pour l'examen, face aux docteurs de la loi. « C'est mon Fils. Depuis trois lunes et douze jours il est arrivé à l'âge que la Loi indique pour la majorité. Mais je veux qu'il soit majeur selon les préceptes d'Israël » déclare Joseph devant « une dizaine de docteurs qui ont dignement pris place sur des tabourets de bois peu élevés »40.2. Dix personnes, c'est justement le nombre minimum requis (le miniane) pour toute cérémonie du judaïsme.
Voici une nouvelle occasion de constater l'extrême précision de ce récit, qui permet ici de déterminer à la journée près la date de cette cérémonie, le jeudi 16 avril 9227. Cette date tardive impose que l'an 9 ait été une année embolismique228. Or c'est exactement ce qu'on apprend, un millier de pages plus loin dans l'œuvre, lorsque le rabbi Gamaliel rencontre pour la première fois Jésus adulte, chez Joseph d'Arimathie, durant l'automne de l'an 27. Il se remémore alors une discussion qu'il eut au Temple, avec « quelqu'un qui sortait de l'enfance » et « qui disait des paroles de sagesse ». « Dieu resplendissait sur son visage innocent et charmant… Il y a dix neuf ans229 que j'y pense et que je garde ce souvenir… ». Puis il ajoute : « Vous pouvez tous vous rappeler quelle récolte il y eut en cette année de treize mois comme celle-ci230 »114.8. Quel auteur serait capable d'imaginer de sa propre initiative de tels dialogues ?
Ce n'est pourtant pas la seule surprise que nous réserve cet épisode. Joseph poursuit la présentation de son fils devant les scribes et les docteurs : « Il connaît les préceptes, les traditions, les décisions, les coutumes des parchemins et des phylactères. Il sait réciter les prières et les bénédictions quotidiennes. Il peut donc, connaissant la Loi elle-même et ses trois branches de l'Halascia, Midrasc et Agada, se conduire en homme »40.2. D'évidence, Maria Valtorta rapporte phonétiquement des termes dont elle ignore certainement la signification, mais qu'on retrouvera plusieurs fois cités dans l'œuvre : Halakha231, Midrash232 et Haggadah233. L'examen commence par la lecture d'un des rouleaux de la Torah. « On donne à Jésus trois rouleaux différents en disant : lis celui qui a un ruban doré »40.4. Et un peu plus tard : « Ouvre le rouleau au ruban vert ». L'obligation de tenir les rouleaux de la Torah fermés se trouve effectivement prescrite dans le Talmud de Jérusalem234. L'usage de rubans (mappoth) à cet effet a pu évoluer au cours des siècles. Il était en tout cas encore courant au 18e siècle235.
Puis l'un des juges commence à interroger Jésus, et l'auditoire s'étonne de la sagesse de ses réponses. Les questions se font de plus en plus ardues, comme par exemple lorsqu'on Lui demande : « si une poule pond un œuf ou si une brebis a son agneau lejour du sabbat, sera-t-il permis d'utiliser le fruit de ses entrailles ou bien faudra-t-il le considérer comme une chose abominable ? »40.5. Pour étonnante qu'elle puisse nous paraître aujourd'hui, cette question ne doit rien à la fiction, puisqu'elle est attestée au 12e siècle par le célèbre rabbi Maïmonide. C'est qu'en effet le précepte était formel : « tout travail accompli durant le sabbat est un péché ». La réponse de Jésus est sans appel : « la conception et la génération correspondent à la volonté de Dieu et sont réglées par des lois qu'Il a données à toute créature ». La poule ou la brebis obéissent à ces lois divines, et leur fruit peut être regardé « comme sacré, même pour l'autel parce qu'il est le fruit de l'obéissance au Créateur ». Plein d'admiration, l'examinateur s'exclame : « Pour moi, j'arrête l'examen. Sa sagesse étonnante surpasse celle des adultes »40.5. Quelle leçon aussi pour notre monde qui en est arrivé à nier même l'existence de Dieu !