Valerius et Valeria, un couple romain déchiré
Valérien est présenté dans l'œuvre comme un « noble romain de la suite du Proconsul. (...) C'est un des romains les plus riches et les plus dégoûtants que nous avons ici. Et il est cruel autant que dégoûtant »254.5. Son esclave Sintica s'enfuit pour échapper aux caprices de ce « maître dans l'art de l'orgie ».
Les Valerii (ou gens Valeria) sont l'une des familles romaines les plus importantes417. Le Valérien cité dans Maria Valtorta pourrait bien être Decimus Valerius Asiaticus (-5/+47). Celui-ci, né à Vienne (vallée du Rhône) et dont on ignore le début de carrière, s'installa à Rome dans les dernières années de Tibère... Il fut admis au Sénat et nommé consul en +35 et en +46. Proche de Claude (né à Lyon), il le suivit dans la campagne de 43 contre les Bretons418. Sa richesse et sa brillante carrière lui permirent de devenir propriétaire de la villa et des jardins créés à Rome vers 60 av. J.-C. par Lucullus. Il était richissime, très influent à Rome mais aussi à Vienne. Se retirant dans ses jardins de Rome, et « occupé surtout de ses plaisirs, il s'abandonna à la vie voluptueuse et de débauches d'un épicurien419 ». Jalousé par Messaline (qui convoitait sa propriété luxueuse), il fut arrêté à Baiae et condamné au suicide par Claude420. Originaire de la Narbonnaise comme Pilate, sa présence en l'an 26 auprès de Pilate et de Plautius et son âge (29 ans) au moment de la naissance de sa fille Faustina coïncident bien.... Son surnom, Asiaticus, laisse supposer qu'il s'illustra en Asie ! « Lui s'est fait envoyer à Antioche près du Consul, en m'imposant de ne pas le suivre »531.11. nous apprend sa jeune épouse Valéria en septembre 28. Or l'Histoire retient que Valérien rejoignit le consul de Syrie Gnaeus Sentius Saturninus l'ancien, à Antioche justement en l'an 28 ! Eutrope421 nous indique que le fils de ce dernier422 fut l'un des généraux accompagnant Claude dans la conquête de la Grande Bretagne en 43, tout comme Valérius Asiaticus, mais aussi Aulus Paulus, et le futur époux de Flavia Domitilla, Vespasien423 !
Quant à sa jeune épouse Valéria, devenue ouvertement disciple de Jésus après la guérison de sa fillette Fausta, elle se sépare progressivement de son mari "un être misérable, dominé par une animalité brutale, licencieux, adultère, distrait, indifférent, qui se moque des sentiments et de la dignité de son épouse" 531.10 qui avait osé dire, à la naissance de sa fille : ""Quand on lui montra la fille, il se mit à rire en disant: "J'aurais bien envie de la faire mettre par terre. Ce n'est pas pour avoir des filles que j'ai pris le joug matrimonial... Qu'on lui donne le nom de Libitina424, et qu'elle soit consacrée à la déesse"531.11.
Restée seule avec sa fille, Valéria décide "Je ne quitterai pas ces lieux… je resterai ici avec Tusnilde425. Je suis libre, je suis riche, je puis faire ce que je veux, je puis faire ce que je veux. Et ne faisant pas de mal, je fais ce que je veux"583.12
Il ne semble pas que les historiens romains mentionnent cette première épouse de Valérien, certainement "oubliée" à Rome, où elle ne vécut pas. Par contre, est-il possible de retrouver sa trace dans certains textes rabbiniques426 ? Une femme riche prénommée Valéria427, « qui possédait des esclaves », y est considérée comme « devenue prosélyte ». En résidence à Jamnia et à Lydda, après la chute de Jérusalem, elle eut des entretiens avec le petit fils de Gamaliel l'Ancien et le prêtre José sur des contradictions dans la Bible428. Beaucoup d'indices suggérant que la Valéria décrite par Maria Valtorta, que l'on voit dans la synagogue des romains peu avant la Passion, et qui annonce son intention de rester là où elle a vu naître sa foi pourrait bien être cette mystérieuse Valéria devenue prosélyte. Jeune mariée en l'an 28, elle aurait donc fort bien pu vivre au-delà de la décennie qui suivit la chute de Jérusalem en 70.