Le séjour à Ephraïm
Les Écritures ne nous disent rien du lieu de refuge de Jésus avant la Pâque, si ce n'est par un simple verset dans saint Jean(Jn 11,54). Pourtant ce séjour a laissé sur place une trace durable , puisque deux mille ans après, Taybeh reste le seul village entièrement chrétien de tous ceux visités par le Christ durant sa vie publique. Maria Valtorta consacre presque deux cent pages de son œuvre à ces trois mois de retraite pendant lesquels les apôtres et les disciples vont tisser des liens étroits avec les samaritains. Ainsi pourront-ils facilement s'y réfugier à nouveau, lors de la première persécution de l'Église naissante (Ac 8 1-17). C'est également une période que le Christ met à profit pour parachever l'enseignement de sa doctrine auprès des siens.
Après une brève escale nocturne chez Nike, près de Jéricho, le groupe apostolique bravant l'interdit sabbatique, reprend la voie romaine du nord dans la vallée du Jourdain. C'est seulement lorsqu'ils se dirigent visiblement vers la Samarie que Jésus les informe : « À cette heure, on va lire dans les cinq cents et plus synagogues800 de Jérusalem et dans celles des villes qui ont pu recevoir le décret émis hier à sexte, que je suis le grand pécheur et que quiconque sait où je suis a le devoir de me dénoncer au Sanhédrin pour que je sois arrêté… »551.5. Et lorsqu'ils trouvent refuge à Ephraïm, le Seigneur leur précise : « Nous ne partirons d'ici que pour revenir à Jérusalem pour la Pâque »552.1. Quand à nouveau, le sabbat suivant Jésus se trouve contraint de marcher après le coucher du soleil, Judas feint de s'en offusquer. Jésus réplique : « J'ai marché après le coucher du soleil, mais mon Père m'en absoudra car j'ai accompli un acte de miséricorde »553.4 et Il ajoute « devant une nécessité sainte on doit savoir appliquer la loi avec souplesse d'esprit »553.5.
Chaque sabbat est une occasion pour faire méditer les apôtres sur les textes sacrés, et pour leur en expliquer le sens véritable. Ainsi par exemple, commentant l'épisode biblique du bouillon imbuvable(2 Rois 4,38-41), Jésus soumet aux siens ce beau sujet d'exégèse : « que signifie pour vous la farine qui enlève l'amertume à la soupe des fils des prophètes ? »554.8. Pourrait-on honnêtement envisager que Maria Valtorta ait « imaginé » la réponse donnée par Jean ? Tout au long du séjour à Ephraïm, de tels exemples se répètent régulièrement, et sont souvent, pour les uns et les autres l'occasion d'approfondissement de la doctrine du Christ et la préparation à leur future mission. Une fois Jésus annonce à Pierre : « Un jour, et il ne se passera pas des années, toi, ainsi que tes compagnons, vous devrez écouter les confidences des cœurs, non pas comme vous les écoutez maintenant en tant qu'hommes, mais comme Prêtres, c'est-à-dire Médecins, Maîtres et Pasteurs des âmes, comme Moi, je suis Médecin, Maître et Pasteur. Vous devrez écouter, décider et conseiller. Votre jugement vaudra comme si Dieu même l'avait prononcé… »555.2. La réaction de Pierre est immédiate : « Cela n'est pas possible, Seigneur. Ne nous l'impose jamais. Comment veux-tu que nous jugions comme Dieu si nous ne savons même pas juger comme hommes ? »555.2. Et Jésus lui indique comment juger les fautes avec justice et comment pardonner inlassablement celui qui se repend... Puis Il ouvre l'esprit de l'apôtre au sens de la souffrance et du sacrifice.
Durant cette période Jésus garde à ses côtés Judas, dans une ultime tentative de conversion. « Si cela ne sert pas à son esprit cela servira au mien, car je ne pourrai pas me reprocher d'avoir omis quelque chose pour le sanctifier »555.5. Mais Judas, « vendu au Sanhédrin et traître du Christ »561.13 refuse toute miséricorde. Il est pris en flagrant de vol par Jean et Jésus. « Aujourd'hui voleur, demain assassin. Comme Barabbas. Pire que lui »567.12. Dans un face-à-face pathétique, Jésus tente encore vainement de racheter le coupable impénitent. Puis Il supplie le préféré : « Jean, par amour pour Moi, oublie tout cela. Je le veux. » « Oui, mon Seigneur. J'essaierai de le faire801 »567.27. Plus tard Il déclare à Judas : « celui qui sans en avoir l'ordre et sans y être contraint tue un innocent, ou coopère à son meurtre, va devant Dieu avec le visage horrible de Caïn »571.3.